Rencontres de tuishou 2022 : compte rendu

Pour commencer, on ne pouvait qu'apprécier le cadre magnifique de cette région, l'accueil chaleureux des organisateurs, et l'esprit de partage qui animait tous les participants. Sur le plan plus technique, réunir des pratiquants de styles différents (voire sans style bien défini) est toujours très riche quand on sait "vider sa tasse" comme c'était le cas ici.

Pour résumer rapidement mes trois ateliers, mon intention première était de présenter quelques spécificités du style Chen à travers des exercices à pas fixes et à pas mobiles. Les premiers étaient construits sur la base d'un tuishou simple à une main et permettaient de découvrir ou approfondir certains principes d'absorption, de mobilité, de stratégie, permettant d'amener diverses applications martiales caractéristiques du style Chen. Le second type d'exercices mettait l'accent sur l'agilité des déplacements, des placements par rapport au partenaire, l'intention martiale, avec à nouveau quelques applications typiques du style Chen. Au passage, il est frappant de constater que la plupart des échanges libres (voir ci-après) se déroulaient sans bouger les pieds, ce qui conférait à cet atelier une certaine singularité, alors qu'une opposition vraiment libre devrait naturellement comprendre des déplacements. La plupart des participants à mes ateliers étaient issus d'horizons différents, et je ne peux que souligner leur ouverture d'esprit et la qualité de leur écoute et de leur travail.

Lors de ces rencontres, chaque animateur pouvait ensuite participer à des ateliers en tant qu'élève. C'était même encouragé ! Ce fut un vrai bonheur pour moi de participer à celui de Jean-Jacques Sagot (style Wu et Sun), dont les qualités pédagogiques sont exemplaires et l'expérience dans cet art martial vraiment palpable. En plus de ces ateliers, des créneaux de tuishou libre avec le partenaire de son choix étaient prévus, ce qui favorisait également de belles rencontres. Il émane en effet de chaque personne une énergie propre, parfois très douce, parfois plus rigide, et une manière spécifique de résoudre les problèmes posés par l'autre. Varier ses partenaires d'entraînement est donc essentiel.

Au cours de ces deux journées, il était aussi possible d'assister ou participer à des ateliers sur le tuishou de compétition. Tout d'abord, il faut à mon avis saluer le travail fourni par les auteurs des nouveaux règlements (notamment Christophe Lefay et Patrick Raffin) mis en place pour Europa Taichi 2022, qui ont assoupli les règles afin de favoriser des échanges moins hachés et autoriser des actions plus conformes à la pratique du tai chi chuan (par exemple en termes de saisies), tout cela dans le respect de l'intégrité physique des compétiteurs. Néanmoins, je ferai pour ma part une distinction nette entre l'art martial authentique et cette variante sportive, non dénuée d'intérêt mais qui conduit à des stratégies qui s’avéreraient funestes sur le plan martial. Pour ne prendre qu'un exemple, baisser la tête voire la présenter à son adversaire dans l'unique but de ne pas se laisser déraciner est une solution évidement viable dans un contexte sportif qui n'autorise ni les percussions ni les étranglements mais qui deviendrait éminemment dangereuse sortie de ce cadre. Cet aspect des choses sera-t-il un jour pris en compte dans ce type de compétition ? En attendant, à mon humble avis, il incombe aux pratiquants d'abandonner ces réflexes délétères en dehors de l'aire de compétition.